Qui était Mgr Oscar Romero ?

Publié le 19 septembre 2018 avec les mots-clés: Actualités

Mgr Oscar Romero va être canonisé le 14 octobre 2018. Il a donné son nom à notre groupe. L'article de La Croix reproduit ci-dessous vous explique qui il était.

https://africa.la-croix.com/mgr-oscar-romero-leveque-pauvres-sera-canonise/

**Mgr Oscar Romero, « l’évêque des pauvres » sera canonisé
Auteur Marie MALZAC, 8 mars 2018

Le pape François a approuvé mercredi 7 mars le décret autorisant la canonisation de Mgr Oscar Romero, symbole d’une Église rempart des opprimés, assassiné en 1980 par les « escadrons de la mort », en pleine guerre civile au Salvador.
L’annonce de la canonisation de cette icône de l’Église latino-américaine était particulièrement attendue. Il ne manque désormais plus que la date de la cérémonie au cours de laquelle le pape proclamera saint Mgr Oscar Arnulfo Romero : l’évêque salvadorien, défenseur des paysans sans terre, fut tué en pleine messe par un commando d’extrême droite en 1980, dans un pays alors sous dictature militaire et ravagé par la violence. François a en effet approuvé mercredi 7 mars le décret reconnaissant un miracle attribué à cet homme emblématique d’une Église protectrice des plus pauvres.

Ce 24 mars, il y a presque quarante ans, Mgr Oscar Romero était en train de célébrer dans la chapelle de l’hôpital de la Divine-Providence, à San Salvador. Vers 18 h 30, quelques instants avant la consécration eucharistique, un homme armé, arrivé à bord d’une voiture rouge, tira sur lui, le touchant en plein cœur. Sa mort « en haine de la foi », faisant de lui un « martyr » de l’Église catholique, a été reconnue par le pape François en 2015, lui qui n’a jamais fait mystère de l’admiration qu’il porte à cet homme qui a payé de sa vie son engagement. La même année, il était béatifié, au Salvador, le 23 mai.

« La voix des sans-voix »
Né en 1917 dans une famille nombreuse et modeste, à une époque où le Salvador était déchiré et l’Église persécutée, il est ordonné prêtre à Rome en 1942. Obligé d’interrompre son doctorat, il rentre au Salvador et devient curé dans le diocèse de San Miguel. Il le restera pendant vingt ans, avant d’être nommé recteur du séminaire de San Salvador, puis secrétaire général de la Conférence des évêques salvadoriens. Nommé par Paul VI évêque auxiliaire de San Salvador (1970), puis évêque de Santiago de María (1974), il devient, trois ans plus tard, archevêque de San Salvador. Il est alors réputé conservateur.

Mais l’assassinat, en mars 1977, par les « escadrons de la mort », de son ami jésuite Rutilio Grande, engagé dans la défense des opprimés, va le faire profondément évoluer, au point d’être surnommé « la voix des sans-voix ». Sans adhérer à la Théologie de la libération, il admet la légitimité, dans certaines circonstances, de l’action politique, dénonçant les exactions des militaires au pouvoir à partir de 1979, et leur soutien par les États-Unis. Aux yeux de la bourgeoisie catholique et d’une partie de l’épiscopat salvadorien, il devient un dangereux agitateur. Ses discours et interventions pour l’arrêt de toute violence sont de plus en plus gênants pour le pouvoir. La veille de sa mort, il avait notamment lancé un vibrant appel à l’armée, depuis sa chaire de la cathédrale de San Salvador, demandant aux soldats de ne pas se transformer en « assassins de leurs frères paysans ».

Implication personnelle du pape François
Son assassinat spectaculaire en fait rapidement une icône. Non seulement pour les Salvadoriens et les catholiques d’Amérique latine soucieux de justice sociale, mais plus largement pour beaucoup de chrétiens désireux, à l’époque, de voir l’Église prendre la défense des populations pauvres.

Sensible à cette figure, le pape argentin s’est personnellement impliqué dans ce dossier. Quelques jours après son élection, il donna des instructions à l’ensemble des dicastères du Vatican, afin que tous les documents dont ils disposaient sur Mgr Romero, quelle que soit leur importance, soient envoyés à la Congrégation des causes des saints. Il débloquait ainsi un procès au point mort depuis plusieurs années, certains à Rome craignant une récupération politique de l’évêque salvadorien…

Ainsi, après la mort de Mgr Romero, beaucoup dans l’Église ont pensé qu’il avait été assassiné pour des motifs politiques, parce qu’il était un « subversif » – selon la thèse soutenue à l’époque par les militaires et les politiques salvadoriens. Jean-Paul II n’était pas insensible à ces arguments.

En 2007, dans l’avion qui le conduisait à Aparecida (Brésil), Benoît XVI avait toutefois déjà manifesté une ouverture sur le sujet, évoquant certes les nombreuses « questions en suspens dans ce procès » mais révélant aussi le bon avancement de la cause.

Près de quatre décennies après un meurtre qui a secoué l’ensemble du continent latino-américain, l’enquête sur la mort de Mgr Romero a été rouverte il y a un an au Salvador, à la suite d’une loi d’amnistie interdisant de poursuivre les auteurs de crimes durant la guerre civile. Une recherche de justice et de vérité qui se poursuit dans un pays toujours rongé par une violence endémique et de profondes inégalités sociales.

Marie Malzac